Témoignage – J’ai été répudiée par mon mari

Article : Témoignage – J’ai été répudiée par mon mari
Crédit: istockphoto

Témoignage – J’ai été répudiée par mon mari

« Ils  eurent beaucoup d’enfants et vécurent heureux jusqu’à la fin de leurs jours ». Cette fatidique phrase qui retentit à la fin des films d’amour ou des histoires de princesses reste, la plupart du temps, loin de nos réalités. Il est clair que cette jeune dame n’a pas eu la chance de vivre une histoire d’amour parfaite comme celles des romans à l’eau de rose ou des téléfilms. Suivez son histoire.

L’HISTOIRE

 « Mon fiancé, je l’ai rencontré lorsque nous étions à l’Université. Lui, était en faculté de droit et moi en faculté de lettres modernes.  Mes parents vivaient à Aboisso et moi je vivais à la cité universitaire de Cocody.  Déjà étudiant, il se privait de beaucoup de choses pour moi.  Venant d’une famille modeste, c’était vraiment compliqué pour moi de joindre les deux bouts. Il m’arrivait parfois de dormir le ventre vide. Mon fiancé, quant à lui,  il était l’unique fils d’un commandant de la douane. Conscient de ma situation, à chaque fois que ses parents lui faisait parvenir son argent de poche, il venait me retrouver dans ma chambre et me disait:- » Bébé, tiens un peu argent pour tes besoins ». Je me souviens de ce soir où je suis tombée dans les pommes devant l’amphithéâtre. On venait de finir les compositions de la première session. La veille de la composition, j’avais révisé jusqu’à trois heures du matin. Ce jour là , sans la présence de mon fiancé, je ne serai peut-être plus de ce monde. Mes amis m’ont conduit au Centre Hospitalier Universitaire (CHU). Les médecins ont requis des examens de sang en précisant que sans les résultats de ces examens, ils ne pourraient par m’ausculter. Aucun de mes amis n’avait les moyens de payer les frais des examens médicaux. Informé, mon fiancé est arrivé en sueur à mon chevet. Il paya les frais des examens médicaux. En fait, je souffrais d’une fièvre typhoïde. Et je fus hospitalisée. Maman, venu le lendemain, ne cessa de le remercier. Je ne trouverai jamais assez de mot pour qualifier mon bien-aimé.  En un mot c’était le mec dont toutes les filles rêvent .

Après ses études, mon homme n’a pas eu du mal à s’insérer dans le tissu professionnel. Comme son père, il rejoignit la douane ivoirienne. Il prit un somptueux appartement de trois pièces à Cocody Angré et je l’y rejoignis. Quelques mois plus tard,  on se rendit à Aboisso chez mes parents pour les formalités coutumières. Trois heures de route, à scruter l’horizon et nous arrivâmes enfin chez mes parents . Après les accolades, ils nous demandaient les nouvelles. Mon homme prit la parole et dit: «Les nouvelles sont bonnes. Cela fait des années que je suis avec votre fille. Je suis venu vous demander sa main».

A ces mots, mon père prit la parole, avec un sourire sur les lèvres:

«Mon fils, je t’attendais même. A notre époque, tant que tu n’as pas marié une fille, elle ne peut pas s’installer chez toi. Mais aujourd’hui, les choses ont beaucoup changé. Tout ça, c’est les blancs qui ont envoyé ça chez nous. Comme il y a longtemps vous êtes ensemble là, tu vas payer cher dêh! », dit-il en riant.

Il donna la liste de la dot à mon homme. La dot était constituée de pagnes, de liqueurs, des présents au père et à la mère de la mariée, un sac de sel et d’une somme de deux cents milles francs (200.000). Trois mois plus tard, mon mariage coutumier fut célébré.

Les années passaient, et nous étions amoureux comme au premier jour. Je nageais dans le bonheur. Cependant, une seule chose me peinait. Mon rêve était d’être un professeur de français.  Après des échecs répétitifs au concours d’entrée à l’Ecole Normale Supérieure (ENS), je trouvai un poste d’enseignante dans un collège privé. Estimant le salaire insignifiant, je me résignai. Mon fiancé me proposa de me lancer dans le commerce. Pour moi, c’était une insulte. « J’ai passé des années à l’université, à lutter pour obtenir mon Master, et toi tu veux que je devienne une simple commerçante? Si c’était pour aboutir au commerce, j’aurais arrêté mes études au CM2 », lui dis-je. Toutes tentatives de me convaincre se soldaient par des disputes. Las, il me laissa à mes convictions. 

Les années se succédaient, emportant avec elles, mon rêve d’intégrer l’École Normale Supérieure (ENS). C’était un lundi comme les autres. Les premières lueurs du jour perçaient les rideaux de la chambre. J’ouvris les yeux, jetai un coup d’œil à l’horloge qui était posée sur la table. Il était six heures quinze minutes. Encore une nuit seul dans mon lit. Depuis quelques mois, mon homme avait beaucoup changé. Il rentrait tard. Souvent, il passait les nuits dehors sans me prévenir. Et moi comme une idiote, je passais mon temps à l’attendre, toute inquiète, car il était injoignable. A chaque fois qu’il rentrait, il justifiait son absence par une séance de travail imprévue ou une urgence douanière à la frontière. J’avais fini par m’y accoutumer. Ce matin-là, je m’étais réveillé avec des céphalées. Malgré ce terrible mal de tête, je me mis sur mes jambes. Mais un léger vertige me fit me rassoir sur le bord du lit.  J’observais mon fils qui avait trois et demi couché dans notre lit. Je souris et me dis:  « Tu as pourtant un lit à toi tout seul, et tu préfères venir te coincer entre papa et maman ». A cette réflexion, mon esprit s’éclaira.

Oups ! J’avais un retard de deux mois et ces signes? Étais-je enceinte? Cela faisait bientôt cinq années qu’on vivait maritalement. Et mon homme ne se décidait pas à officialiser notre union. L’idée de me savoir enceinte  à nouveau me fit prendre conscience de la nécessité d’officialiser notre union. Dans le courant de la journée, je fis un test de grossesse. Il s’avéra sans aucune surprise positif. Il était dix-heures. On sonna. Je me précipita à la porte. Par l’œil de Judas, je reconnus mon homme. « Dieu merci, il est rentré aujourd’hui », me dis-je. Nous primes le dîner. Et c’est une fois seul dans notre chambre que je lui dis:
«- Chéri, je suis enceinte.
– Bravo, félicitations! J’espère que ce sera une fille. Elle portera le nom de ma mère.
– D’accord. Mais bébé, cela fait plus de six ans que nous sommes ensemble. Tu ne parles même pas de mariage. J’aurai bientôt un deuxième enfant. S’il te plaît, ne laisse pas les gens se moquer de moi .
-Il y a quoi ? Tu as l’argent pour organiser le mariage? Je ne suis pas prêt maintenant. Si toi tu as de l’argent, il faut l’organiser. Tu crois qu’on se lève comme ça pour organiser un mariage. Arrête de m’emmerder!
»

Sur ces mots, il se leva, s’habilla et sortir de la maison. Des larmes coulaient le long de mes joues. Mon amertume, ma tristesse, je ne pouvais la conter à personne. Seul Dieu sait ce que j’endurais. Cet homme qui m’avait rendu jadis heureuse, est devenu aujourd’hui mon bourreau. Ma seule consolation était mon petit garçon. Il parvenait à mettre un peu de joie dans mon cœur.

Comme le désirait mon homme, je donnai naissance à une fille. Ma fille était la copie conforme de mon fiancé. Et chaque regard sur mon bébé me rappelait l’amertume que son géniteur me faisait vivre. Malgré tout, je demeurais une bonne mère et une bonne femme au foyer. Je ne laissais rien paraître de ma souffrance. Mon bébé grandissait et ma peine aussi.  Elle avait cinq mois, et un jour mon fils me dit: «Maman oh! La dernière fois, je suis allé avec papa chez une tantie. Et puis, il a fait bisou sur sa bouche. La tantie là, elle a un bébé aussi.»

Ses absences répétées, ses justifications qui ne tiennent pas débout, son indifférence à mon égard, sans compter le fait qu’il subvenait difficilement aux charges familiales… Non! Lui, mon amour de jeunesse entretenir une autre relation ? C’est impossible, il ne pouvait pas me faire ça. Je pris donc ces propos à la légère surtout qu’ils venaient d’un enfant.

Un soir, mon homme rentra du boulot et me dit: « Ecoute, j’ai rencontré une autre femme et je l’aime. J’ai décidé de l’épouser. Je souhaiterais que tu quittes cet appartement. J’ai déjà rompu le contrat de location. On a une semaine pour quitter l’appartement. Si tu veux, tu peux rester si bien sûr tu as les moyens de payer le loyer. »

Toute confuse, je restai figée sans dire un mot.  Le lendemain, je me rendis chez ses parents. Informés, ils essayaient de le ramener à la raison en vain. On me demanda de partir chez mes parents le temps de résoudre le problème. Cela fait bientôt un an que je suis partie. Aux dernières nouvelles, il se serait marié légalement avec cette dernière, une coiffeuse. Quant à moi, contrainte par la dure réalité de la vie, je me suis retrouvée à vendre du pain, dans un collège privé de la ville d’Aboisso. »

MON POINT DE VUE

Triste histoire, n’est-ce pas? Des histoires semblables, vous en connaissez certainement. Jusqu’à en juin 2019, la dot était interdite en Côte d’Ivoire. Aux termes des articles 21 et 22 de la loi No 64-381 du 7 Octobre 1964, « celui qui sollicite, agrée ou tout intermédiaire sera puni d’une peine d’emprisonnement de six à deux de prison et d’une amende double de la valeur des promesses, des choses demandées ou reçues sans toutefois que l’amende soit inférieur à 500.000 francs » .

Grâce à la lutte acharnée de certains activistes, cette loi a été abrogée. Cependant la loi reste muette sur la valeur du mariage coutumier. A mon avis, la loi sur le mariage devrait faire l’objet de révision par le parlement.  Il serait convenable que nos parlementaires réglementent les conditions de la dot pour éviter les débordements et les abus. En droit comparé, le Sénégal est un bel exemple. La loi sur le mariage prévoit les conditions et les formalités de la dot. Le parlement ivoirien gagnerai à réviser la loi sur le mariage.  Contrairement à la jeune dame de l’histoire, plusieurs femmes sont restées avec des hommes, ont participé aux charges du ménage, soutenues leurs hommes financièrement et ont été répudiées par ceux-ci lorsqu’ils ont acquis un meilleur statut. Il faut davantage renforcer la protection de la femme. Car les lois sont faites pour maintenir un État de droit et assurer la protection des individus. Lorsqu’une tradition ou une coutume est bonne, il est judicieux de la maintenir, dans la mesure où la coutume est une source du droit.

Toutefois la jurisprudence qualifie le concubinage de « société créée de fait« . C’est-à-dire que sur cette base juridique, si une femme est répudiée après des années de concubinage, elle pourra  demander une indemnisation et une part des biens acquis par son concubin pendant leur vie commune.

Femme, je voudrais attirer ton attention sur l’attitude de cette dame. Vois-tu comment et pourquoi il est nécessaire pour toi d’être autonome? L’école, les diplômes ne t’ouvriront  pas forcement les portes du  monde du travail. Tu es peut-être diplômée et tu es en quête d’emploi, à défaut de trouver un poste dans une entreprise ou d’intégrer la fonction publique, je voudrais t’inviter à te lancer dans l’entrepreneuriat. Avec le peu que tu as; crées une activité génératrice de revenus. Crois moi, tout dépend du sérieux que tu mettras dans ton activité. On connaît tous l’histoire de ces femmes parties de rien pour devenir de grandes dames d’affaires. Comme le dit l’adage » il n’y a pas de sot métier« . Commerçante, comptable, enseignante, ne sont que des titres. Le plus important, c’est de gagner honnêtement sa vie et de parvenir à être autonome et indépendante.

Quant à toi jeune fille que cette histoire te serve de leçon.

CAR LE LEADER DE DEMAIN, C’EST TOI !

Partagez

Commentaires